Les clés du cash-flow management
Au démarrage d’une start-up, bien gérer sa trésorerie constitue une des bases pour assurer un bon développement. Car, sans « cash », une idée aussi innovante soit-elle restera un concept. François Jegard, fondateur du cabinet d’expertise comptable Jegard Créatis, nous explique quelles sont les règles à suivre pour un bon cash-flow management.
French IoT : Comment définiriez-vous la notion de « cashflow management » ?
François Jegard : Cash-flow management, gestion ou plan de trésorerie : quel que soit le nom qu’on lui donne, il s’agit d’un des nerfs de la guerre pour toute entreprise en démarrage et en forte croissance. Cette notion se structure autour d’un principe simple : toute action portée a des conséquences sur la trésorerie. Au fond, cela renvoie à l’idée que tous les engagements que peut prendre une entreprise ne deviennent concrets que si elle a du cash à dépenser.
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Fr.IoT : Pourquoi est-il fondamental de bien maîtriser sa trésorerie ?
F.J. : Il ne faut pas se laisser tromper par l’idée qu’une SARL peut exister légalement avec un capital minimal d’un euro. Disposer d’un fonds de roulement solide est une condition sine qua non pour démarrer. Sans une démarche de planification des dépenses, la meilleure idée du monde ne libèrera son potentiel. Un entrepreneur ne peut pas jouer éternellement sur des éléments comme la rémunération ou la location des locaux.
À un moment donné, si vous avez des clients, il faut pouvoir les recevoir. Les collaborateurs qui étaient galvanisés par votre projet au départ vont avoir besoin d’être payés. Tout cela se pense dans le plan de trésorerie.
« Un point régulier avec son expert-comptable pour savoir où on en est »
Fr.IoT : Quelles sont les règles d’or que tout jeune entrepreneur doit connaître ?
F.J. : En premier lieu, il faut intégrer le cash-flow management dans ses outils de pilotage dès le lancement de l’activité. Il faut aussi planifier toutes les dépenses, en n’oubliant pas de prendre en compte la TVA. Au niveau des ressources, l’un des principes de base reste que, si vous n’avez pas besoin des banques, mieux vaut ne pas les solliciter. Les partenaires bancaires sont là pour financer l’investissement, ce qui va générer du cash, mais ne doivent pas servir à financer l’exploitation de l’entreprise. Enfin, j’aime bien rappeler qu’un client sympa, c’est bien, mais qu’un client qui signe, c’est mieux. Une bonne « accroche », c’est quelqu’un qui est capable d’acheter votre service ou votre produit, même si la commande est petite, parce que cela montre qu’il croit en votre projet.
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Fr.IoT : Une start-up est-elle forcément seule dans cette tâche ?
F.J. : Sur ces sujets, mon conseil est justement de ne pas s’isoler. L’erreur serait de penser que votre expert-comptable n’est là que pour faire le bilan des recettes et des dépenses. Au contraire, sa valeur ajoutée réside dans l’accompagnement sur le long terme, la capacité à fournir un regard sur la gestion opérationnelle afin de se projeter vers l’avenir. Certains investisseurs peuvent être de bon conseil, mais, leur plus-value se situe plutôt du côté du business, de la relation client.
Un point régulier avec son expert-comptable permet de s’arrêter momentanément pour savoir où on en est, si le chemin qu’on prend est le bon ou s’il faut l’ajuster. Et cela même lorsque votre entreprise a passé le cap de la phase de démarrage.
« Ne pas oublier de payer les fournisseurs, notamment les sous-traitants »
Fr.IoT : Justement, le cash-flow management change-t-il lorsque l’entreprise accède à un stade de maturation plus élevé ?
F.J. : À partir du moment où une start-up entre en cycle de production, les dirigeants ont naturellement moins l’œil sur leur budget. Le tableau des flux de trésorerie permet alors de suivre les évolutions de manière moins serrée. La clé demeure de ne pas oublier de payer les fournisseurs, et notamment les sous-traitants.
C’est un volet très important dans le secteur de la Tech où beaucoup de compétences sont confiées à des travailleurs indépendants. Cela offre de l’agilité à condition d’être clair sur les conditions de rémunération et les délais. Les talents sont nécessaires à la croissance d’une start-up et il faut impérativement les conserver. Pour cela aussi la gestion de trésorerie a son rôle à jouer.
Fr.IoT : Quelles charges fait peser la crise actuelle sur la maîtrise de la trésorerie ?
F.J. : C’est effectivement un moment où le cash-flow management prend tout son sens. Beaucoup d’entreprises se retrouvent sous perfusion administrative avec des emprunts qui couvrent les frais liés à la charge d’exploitation. La question est de savoir comment ces sommes vont être remboursées ?
En général, on finance l’investissement pour stimuler l’activité économique, augmenter le chiffre d’affaires. C’est cette croissance qui permet de rembourser le prêt. Il va donc falloir scruter de près la reprise de l’activité pour voir comment les plus jeunes entrepreneurs vont tirer leur épingle du jeu.
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