De l’électronique à l’IoT : Angers et la high-tech, une histoire qui dure
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De l’électronique à l’IoT : Angers et la high-tech, une histoire qui dure

Forte d’un passé industriel tourné vers les nouvelles technologies, Angers a obtenu sa labellisation French Tech en 2015 en se spécialisant sur l’IoT. Elle multiplie depuis les initiatives pour en devenir une place forte. Point d’orgue : l’accueil, à la fin du mois, du 22e World Electronics Forum.

« Notre territoire est capable de réaliser l’usage intelligent et innovant que vous envisagez pour votre objet connecté. » En s’adressant directement aux porteurs de projets IoT, le délégué territorial d’Angers French Tech, Michel Perrinet, plante le décor.

Beaucoup de Français l’ignorent, mais la capitale de l’Anjou est riche d’un passé industriel tourné vers les nouvelles technologies. C’était le cas dans la deuxième partie du siècle dernier, quand les premiers appareils électroniques puis les ordinateurs sont entrés dans notre quotidien.

C’est encore le cas aujourd’hui, avec l’objet connecté et le développement des usages qui l’accompagnent. Entre le succès de la Cité de l’objet connecté* et l’accueil de la 22e édition du World Electronics Forum, Angers regarde clairement dans la direction de ce que Michel Perrinet qualifie de « prochaine révolution ».

French IoT : Quelle est la nature des liens que la ville d’Angers entretient avec les nouvelles technologies ?

Michel Perrinet : Les racines sont profondes. Le Grand Ouest est une terre de production électronique depuis les années 1950-1960, particulièrement Angers, avec la production des ordinateurs Bull, puis la venue des groupes Thomson, Technicolor, NEC ou Packard-Bell.

Cela s’est un peu tassé dans les années 2000, avec une forte délocalisation en Asie. Les usines sont parties mais le savoir-faire et les compétences sont restés. Cela a aussi été l’occasion de reconstruire l’écosystème.

Dans le cadre de la dynamique French Tech, nous avons porté notre candidature -en 2015- autour de la thématique de l’Internet des objets, puisque le renouveau de l’électronique, c’est l’IoT.

Il y a une explosion de ses usages et c’est ce marché que l’on essaie de capter. Celui qui, selon les estimations, avoisinera les 30 milliards d’objets connectés sur terre en 2020.

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Fr.IoT : La spécialisation sur l’Internet des objets a-t-elle eu des retombées pour le territoire angevin ?

M.P. : Cela a d’abord eu un impact en termes d’image. Avant la labélisation, la production électronique était une affaire de spécialistes. Depuis 2015, nous avons organisé pas moins de seize évènements autour de l’IoT qui ont servi à le démocratiser et à mieux faire comprendre son intérêt auprès des PME. Car elles se demandent bien souvent comment l’utiliser.

L’IoT a aussi permis de développer un grand nombre d’initiatives. La Cité des objets connectés -inaugurée en 2015- est devenue, par exemple, l’un des acteurs majeurs de l’écosystème angevin. Elle a réussi à toucher les deux cibles qu’elle visait, à la fois et les PME et les grands groupes industriels.

Nous avons également lancé, au travers d’Angers French Tech, une série de programmes d’accélération qui permettent aux start-up de mieux dialoguer avec l’industrie. A côté de cela, il y a les outils d’accélération comme l’opération Renard, organisée par la Technopole d’Angers. MyJomo, par exemple, en est issue. Sur le programme French IoT, Velko et Eisox sont également nées d’un incubateur de notre territoire.

Et le summum, c’est l’accueil cette année du WEF (le World Electronics Forum, le festival mondial de l’électronique, ndlr). Il s’agit de LA grande messe de toutes les filières de la production électrique.

« L’IoT, c’est la prochaine révolution qui va transformer notre monde »

Fr.IoT : A propos du WEF, comment Angers a-t-elle réussi à obtenir l’organisation d’un évènement de cette envergure ?

M.P. : On l’a obtenue en échangeant avec Gary Shapiro (directeur du CES de Las Vegas, ndlr). Il a été le parrain de notre labellisation en 2015. C’est ce lien qui a abouti à l’arrivée du WEF à Angers cette année.

Le WEF, ça sera d’abord l’occasion pour les grandes filières internationales de se réunir. Mais on pourra surtout montrer que le Grand Ouest a une feuille de route industrielle pour se structurer dans l’IoT. Cela va nous permettre de fédérer et d’organiser la filière ici, où l’on parle de 25 000 emplois en Pays de la Loire sur l’assemblage électronique.

Lorsque l’on a candidaté à l’organisation du WEF, nous avons souhaité faire passer le message suivant : ‘en venant ici, vous verrez le WEF mais aussi un programme industriel, et en particulier la vision de la France sur les smart usages’. En somme, la manière dont on envisage l’avenir de ce monde électronique.

Fr.IoT : A quoi ressemble cet avenir ?

M.P. : Dans les années 1980-1990, l’électronique a envahi notre quotidien. Elle est devenue une commodité. La période 2000-2010 a été celle de l’arrivée des services numériques. On a eu d’un côté un monde physique devenu plus ‘intelligent’ et de l’autre un monde virtuel avec beaucoup de nouveaux services.

L’objet connecté, aujourd’hui, c’est l’interface entre ces deux univers. L’IoT permet de rendre les objets intelligents, communicants et émetteurs ou consommateurs de data. C’est en cela qu’il représente la prochaine révolution qui va transformer notre monde.

Fr.IoT : Quels vont être les moteurs de cette croissance ?

M.P. : Il y a deux manières de l’approcher. Par l’offre, déjà. Pour nous, c’est l’usage qui va tirer ce monde de demain. Il est déjà en pleine ébullition, en pleine créativité, mais il y a un tas d’usages qui vont encore se digitaliser, c’est pourquoi nous incitons les PME « traditionnelles » de notre territoire à s’intéresser à l’Internet des objets.

La deuxième approche se fait par le message, la vision du monde que l’on va présenter lors du WEF. Sur l’IoT, on ne sait pas quels domaines vont percer mais notre conviction, c’est qu’il faut bien distinguer l’IoT destiné aux professionnels de celui tourné vers le grand public.

Nous pensons que 60% du chiffre d’affaires de l’IoT, dans les années à venir, se feront en B to B. Sur le B to C grand public, on risque de retomber sur la production électronique de masse des années 1990.

Or le B to B est plus en phase avec nos compétences, nos besoins et nos savoir-faire.

>>> Lire aussi : IoT et innovation, « la source ne se tarit pas »

*Docapost, filiale du Groupe La Poste, spécialisée dans la transformation numérique, compte parmi ses partenaires depuis sa création en juin 2015

Propos recueillis par Benjamin Hay – Illustration © altitudedrone – Fotolia.com

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