Objet connecté : comment ne pas tomber dans le gadget ?
Business
Archives

Objet connecté : comment ne pas tomber dans le gadget ?

Pour produire un objet connecté réellement utile, loin du gadget, la connaissance de certaines clés peut aider les start-uppers qui construisent leur projet.

Les études passent, les projections restent les mêmes. Le marché des objets connectés, dans le monde, a un bel avenir. Pas moins de trente d’entre eux prendront place dans les foyers français en 2020, selon l’institut GfK.

Une voie royale qui n’empêche pas les sorties de route. Parfois retentissantes. Lesquelles ont incité nombre d’observateurs et de start-uppers à se recentrer sur la valeur ajoutée principale de l’Internet des objets : les nouveaux usages qu’il crée.

« Unitairement, l’objet connecté n’a aucune valeur, c’est le service qu’il rend qui en a », confirme Antoine Dupont, dirigeant fondateur de la start-up Auxivia. La jeune entreprise a été lauréate de la première promotion French IoT en 2015 grâce à un service de suivi et de traçabilité de l’hydratation des personnes âgées en maison de retraite, basé sur des verres connectés.

Antoine Dupont et son associé se sont rencontrés au cours de leur dernière année d‘études. Pourquoi l’e-santé ? « Le secteur n’offrait que peu d’innovations et il commençait à peine à se transformer », précise le start-upper.

Mais pas question de se lancer à l’aveugle. A l’étude de marché classique, Auxivia a préféré le contact humain. « Pendant plusieurs mois, nous avons rencontré des personnes âgées, des directeurs d’établissement ou des psychomotriciens. Et l’on s’est rendus compte que la problématique de l’hydratation revenait régulièrement », se souvient Antoine Dupont.

Là, prévient-on chez Auxivia, « il faut garder du recul sur ce que l’on entend. On a toujours la volonté de produire une innovation qui touche 100% d’un marché. Mais mieux vaut y mettre moins de fonctionnalités au départ et toucher 10 à 20% du public pour l’étoffer ensuite. »

Selon une étude menée par OpinionWay pour Idealo, à l’occasion du dernier salon IoT World, en mars à Paris, 33% des Français déclarent posséder au moins un objet connecté. Ils sont également 15%, parmi ceux qui n’en possèdent pas, à envisager un achat prochainement.

>>> Lire aussi : Dans l’IoT, faut-il investir beaucoup pour séduire le grand public ?

Identifier et saisir « l’opportunité »

Du côté de la Suisse, autre méthode. Raphaël H Cohen est enseignant-chercheur, co-directeur académique de la spécialisation en Entrepreneurial Leadership du eMBA de l’Université de Genève*. Il distille aussi à de grandes entreprises et start-uppers la méthodologie qu’il a inventée : le « modèle IpOp ». Un carnet de route pour tout entrepreneur en quête de « disruption ».

Fil conducteur : savoir saisir l’opportunité de lancer une innovation IoT. « L’opportunité est la combinaison d’un SBD -soit une souffrance, soit un besoin, soit un désir-, détaille l’expert. Le premier incontournable, lorsque l’on veut créer un objet connecté, est de choisir le bon SBD. »

Reste à déterminer les points « d’accès » au marché. Pour Raphaël H Cohen, « il n’y a aucune chance de rentrer sur certains secteurs sans s’associer à une grande entreprise. Et cela coûtera toujours moins cher de s’assurer l’accès au marché que de faire un prototype pour rien ».

Selon lui, le risque d’échec est plus grand dans le marché de l’objet connecté que sur d’autres secteurs, il y a quelques années. Plus de concurrence. D’où la nécessité d’identifier au mieux les critères d’achat du consommateur. « Nokia, par exemple, vendait bien ses téléphones, jusqu’au jour où Steve Jobs a dit que le téléphone pouvait servir à autre chose qu’à téléphoner, rappelle l’expert. En faisant cela, il ajoute un critère de décision supplémentaire. Nokia a disparu parce qu’il a ignoré l’arrivée de ce critère. »

Pour Raphaël H Cohen, les start-up d’aujourd’hui sont mieux préparées que celles d’hier. Accélérateurs, bootcamps et coachings les aident à avancer sereinement.

Chez Auxivia, on a commencé à équiper les premiers établissements en juin dernier. Une douzaine de maisons de retraite, au total, disposeront de leurs verres connectés d’ici la fin de l’année.

Leur innovation pourrait être améliorée au fil du temps, suivant les retours d’expérience de ses utilisateurs.

Benjamin Hay – Illustration Pixabay.com – ColiN00B

*Raphaël H Cohen est également l’auteur d’ouvrages, dont Concevoir et lancer un projet aux éditions Eyrolles, qui décrit le modèle IpOp.

Partager